[ hey ! je crois que j'ai relevé le défi de forme ! tous mes paragraphes comptent 55 mots selon le compteurs de lettres ]






Les gens se confient facilement, après quelques verres. Ils n'ont pas tous des problèmes, mais certains en tiennent vraiment des couches. Ceux là, Marian n'a pas envie de les regarder s'épancher sur son bar. Ca fait fuir les clients. Il faut savoir les reconnaître en amont, pour ne pas se faire avoir.  



Lorsqu'on lui a proposé cette affectation, dans l'urgence, Marian s'est dit que tout se passerait bien, c'est pourquoi il a accepté. Le jeune Kenyan, qui est de bonne constitution et a une bonne estime de lui-même, pense qu'il en a connu d'autres et qu'il va bien encaisser.

Mais après une acclimatation difficile les premières semaines occasionnant un certain mal du pays, des problèmes d'engelures chroniques, et le stress de la mission, Marian n'avait pas tellement envie de voir tous ces jeunes gens en mal de vivre, parfois dans des situations très compliquées sur lesquelles il ne pouvait pas réellement intervenir.



Cependant, relativisant, il écoutait sans jugement et essayait de trouver les clés, dans leurs paroles, que ces jeunes ne parvenaient pas à voir. Après quelques semaines d'exercice en tant que psy infiltré, il avait deux fois plus de visites qu'au début et était obligé de mettre les nouveaux demandeurs sur liste d'attente.



Dans le cadre de cet emploi de couverture, Marian était amené à communiquer avec ses collègues et il se retrouva à échanger avec le conseiller d'orientation qui n'était autre qu'un chevalier qu'il avait déjà vu esseulé au bar, dont il n'aurait pas pu oublier le visage ni cet étrange regard.

Xander et Marian, qui se côtoyaient souvent depuis quelques temps, dans le cadre d'une relation étroitement professionnelle, se rendirent ensemble en salle des professeurs. Là encore, la fenêtre d'action était brève, car à cette heure précise, tous les professeurs seraient en train soit de donner leur dernier cours, soit de rentrer chez eux.





Dans moins d'une heure maintenant, la sonnerie retentirait, et des enseignants reviendraient chercher elle le dossier qu'une collègue lui a déposé, lui le manteau qu'il a oublié après le déjeuner ... Ils avaient peu de temps pour trouver un indice dans cette pièce, leur permettant peut être de remonter la piste du cadavre ...

- Ca serait quand même fou qu'on déniche un truc utile ... Lâcha Marian d'une voix sans espoir, son regard balayant la salle à la recherche d'un signe, d'une énergie ... Je vais chercher par là, dit-il à son collègue en s'attaquant à une pile de documents qui semblaient oubliés depuis longtemps.

Quand j’avais enfin découvert qu’on avait un psychologue dans l’établissement, ça avait été la révélation. Enfin ! J’y voyais là un moyen de me décharger de gamins dont je ne savais pas quoi faire, mais qui avaient besoin de parler et que je culpabilisais vaguement de laisser dans leur merde - pire, peut-être d’empirer celle-ci.

Puis j’avais tiqué que Marian, le psychologue, était également le barman de l’Aquarium. J’étais déjà passé une ou deux fois dans le bar, et progressivement, j’avais… noué un lien avec ? Professionnel mais relaxant, dans tous les cas. Autant que puisse l’être quelque chose dans cette mission. D’autant plus depuis que Victoria et moi étions tombés sur un cadavre tout “frais”. Pas ce dont j’étais le plus friand. Je voulais en finir.

C’était pour ça que j’avais accepté d’aller fouiller à deux la salle des profs, avec lui parce que je savais que trainer avec le psychologue de l’établissement n’était pas incohérent, et parce qu’il n’était pas un chevalier. Donc pas forcément capable de bien gérer le genre de situations à laquelle Tori et moi avions dû faire face. Déjà que de mon côté, je ne m’étais pas senti très fier dans mes bottes…

Nous avions un peu moins d’une heure pour fouiller, tout remettre en place et faire comme si nous étions juste là pour discuter devant un café que quelqu’un avait déjà eu la gentillesse de faire couler. Sa remarque me tira un sourire

“On a trouvé un bout d’artefact dans un bac à fleurs… Je serais plus surpris de rien, ici.”

Je commençais même vaguement à être … blasé par rapport au nombre absurde de créatures magiques humanoïdes que nous pouvions croiser. Cela me faisait me sentir très peu en sécurité, mais j’essayais de relativiser. Et d’être toujours à peu près sur mes gardes.

“Puis, il doit bien y avoir des traces quelque part, de… ça. Il faut qu’on trouve qui c’était.”

Peut-être n’était-ce pas le seul cadavre que cachait le lycée. Et s’il n’y en avait aucune preuve, peut-être… Peut-être que des choses prenaient la place des morts. Peut-être que nous finirions par être entourés de créatures, changelins ou autres horreurs du genre. Au second cadavre, je me barrais. Avec Tori sur l’épaule s’il le fallait.

“Je m’occupe des notes dans les casiers. Ca semblait frais...”

Notant la théorie des changelins dans un coin de ma tête, j’acquiesçai en voyant que Marian s’occupait d’une vieille pile, et commençai à essayer de regarder dans les casiers, les notes personnelles des autres enseignants. Peut-être qu’il y avait quelque chose là dedans…

Dans les casiers-cercueils, un fouillis de feuilles, des crayons et livres reposent en paix jusqu’à ce que vous les dérangiez.

Vous avez lu les notes personnelles d'une enseignante ayant démissionné :

Des lignes colorées, des dessins et des flèches dynamiques dessinent la vie quotidienne d’une personne qui aimait visiblement son travail. Au fils des pages, toutefois, les couleurs se font plus rares, les dessins inexistants, l’écriture plus simple et moins fine. Toute planification s’arrête finalement en janvier, date où l’enseignante est présumablement partie. Entre la deuxième et troisième semaine du mois, vous retrouvez une feuille déchirée et très étrange.

Le papier est froissé, vieilli, et porte d’étranges emblèmes similaires à la trouvaille de Loreleil dans l’auditorium. Ces symboles pourront maintenant être reconnus comme étant des éléments utilisables lors de la conception écrite de certaines malédictions.

Regardant un par un dossiers obsolètes et poussiéreux, emplois du temps de l'année passée  ayant servi de brouillon et notes diverses à l'attention de telle ou tel professeur.e, Marian ne trouve pas grand chose de probant, de son côté. Il s'attarde sur quelques écritures, avant de passer à la suite.

Au bout d'un moment, prenant conscience du silence troublé qui s'est installé, Marian s'interrompt et se tourne vers son collègue. Immobile, penché sur quelque chose, Xander semble absorbé dans une lecture intéressante.

- T'as quelque chose, toi ?
Il se rapproche de lui et regarde tourner les pages d'un agenda bien rempli, entre autres de dessins et de multiples annotations colorées. Au fil des jours, le style décline, jusqu'en Janvier où quelques pages vides défilent ... libérant une feuille errante, La feuille déchirée, nouvelle pièce du puzzle qu'ils essaient de reconstituer.

Marian, soufflé, ne sait d'abord pas quoi penser.

- Tu crois que ce carnet, il lui appartenait ?
Et que dire de ce fragment ? Tu as l'autre moitié avec toi ?

Il nous fallut un moment pour récupérer un dossier. Celui-ci me tomba entre les doigts alors que le nom me rappelait vaguement quelque chose, de loin. J’avais dû lui être présenté. Je ne me souvenais pas de son visage, il y en avait trop eu, et le peu de détails importants - permettant de l’identifier - que j’avais retenu du cadavre ne pouvaient pas me permettre de savoir si c’était elle ou pas.

Sa vie s’échappait progressivement, même en ne la connaissant pas, on sentait quelque chose de terrible. Je songeais vaguement à la dépression, mal commun à pas mal d’enseignants, jusqu’à… Merde. C’était pas du tout ça. Elle était “partie” en janvier, ça ne pouvait au moins pas trop correspondre à notre cadavre plus récent, mais… C’était sous nos yeux et nous n’avions rien fait, rien vu.

Je répondis par un grognement à la question de Marian et lui tendis le dossier.

“Je sais pas. J’arrive pas à mettre un visage sur son nom, Marian. C’est...”

Je claquai la langue, aussi agacé que frustré.

“Je suis nul, à retenir ces merderies de noms, y’avait trop de visage, j’sais pas. Mais les dates correspondent pas. On va quand même tout embarquer.”

Je récupérai le morceau de parchemin et secouai négativement la tête.

“Je laisse tout en sécurité, que ce soit accessible, mais… J’ai des photos de tout. Sauf des créatures… A l’occasion, peut-être. C’est de l’écriture hébraïque, non ?”

Je détestais avoir à manipuler les images sur mon téléphone, et finis par soupirer avec agacement en tendant l’appareil à Marian. Plus jeune, plus doué avec la techno, plus petits doigts que les miens.

“Les deux fragments doivent pouvoir s’assembler, mais j’arrive pas à faire la manip sur téléphone, vas-y. Et, si par un pur hasard tu lis cette putain de langue, pas à haute voix, d’accord ? On sait jamais. ”

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