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Ven 30 Oct - 1:32

★★★★
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Age : 33
Habitation permanente : À Old Fyre, dans l’appartement qu’elle partage avec Tullio et Elana Cavaleri. Elle a aussi un appartement en Italie.
Occupation : Anciennement détective, maintenant chevalière à temps plein et maman.
Victoria Machiavel

Victoria Machiavel
La vie, bien souvent, se résume en une succession de lignes.

Il y a celles que l’on trace et que l’on suit, que l’on franchit et que l’on traverse avec les bras levés et victorieux, aussi bien que celles desquelles on dévie, celles que l’on perd ou que l’on garde à jamais parce qu’elles se creusent de manière indélébile dans la chaire ou dans le cœur. Il y a les lignes que l’on tend et celles auxquelles on mord, puis celles qui – entrelacées comme un filet – nous retiennent, tandis qu’entre d’autres on se faufile pour le meilleur comme pour le pire.

Dans sa salle de bain, elles prennent notamment la forme de rayons matinaux qui, par la fenêtre, à travers les lattes de bois, tracent sur les cuisses exposées de Victoria ces passages que son regard emprunte pour fuir au moins brièvement la réalité… Seulement pour mieux se faire happer par ses angoisses réalisées. C’est qu’entre ses mains, des lignes, il y en a deux: roses et délicates, elles s’étaient lentement insinuées devant ses yeux qui maintenant s’affolaient en cherchant à trouver, à travers l’humide brouillard qui se forme sous les cils, tout ce qui se vautre entre ces deux traits parallèles. C’est qu’il y a toute une vie contenue dans ces cinq millimètres de plastique blanc, et assez d’anticipation pour plusieurs autres.

Ce n’est pas possible.

C’est d’une sublime ironie, quand même, que de se découvrir enceinte alors que les résultats négatifs s’étaient enchaînés l’année précédente, quand elle avait cherché à concevoir, seulement pour voir son projet réalisé maintenant qu’elle ne le souhaitait plus.

C’est faux. Elle voulait toujours de ce bébé.

Ce sont des circonstances dont elle ne voulait pas. Le moment était juste si mal choisi. Et les pères potentiels? Entre l’ami précieux qu’elle ne voudrait pas voir devenir autre chose et celui dont les circonstances lui inspirent autant de culpabilité que de méfiance…

Elle rit un peu, en faisant le tour de sa cuisine en comptant et en recomptant les jours, encore et encore, et tout semblait pointer vers la semaine de ce voyage en Italie qu’elle avait dû faire pour confronter Alessio afin de venir en aide à son amant Emanuel; elle avait été, bien entendu, avec Even juste avant et juste après cela également. Le père pouvait être aussi bien l’un que l’autre, vraiment… Et Victoria n’était pas certaine de ne jamais vouloir en avoir le cœur net. Ce qu’elle cherche maintenant, en faisant les cent pas dans le salon-musée, c’est un plan d’action. Une solution, quelque chose, mais son cœur bat fort sans qu’elle ne s’essouffle, martelant sa poitrine autant que ses tempes, si bien que, tout comme elle en marchant, ses émotions tournent en rond et s’emmêlent dans un nœud suffoquant.    

Dans cette situation, Victoria ne peut que se demander ce qu’aurait fait Olivia.

- Nour… Souffle-t-elle, en tenant le combiné comme une ligne de survie.

Et quelque part, elle connait déjà la réponse à cette question.

- J’ai besoin, commence-t-elle avant que ne se brise sa voix, et qu’elle ajoute avec un sanglot étouffé, d’une figure parentale.
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Sam 7 Nov - 9:37

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Habitation permanente : Living Mirage, Old Fyre, et entre les deux.
Occupation : Chercheur en tout.
Nour Alizadeh

Nour Alizadeh
De l'autre côté du fil, on entend le bruit familier des papiers qu'on remue, d'un livre qu'on referme. De l'autre côté du fil, il fait nuit et on perçoit presque le silence qui inonde la pièce où, malgré l'heure tardive, la lumière brille encore pour tracer des halos jaunes à travers des obscurités poussiéreuses. De l'autre côté du monde, il fait noir et tout est calme en dehors de la rumeur de la rue qui monte jusqu'à une fenêtre qu'on entend se fermer.

"Nour..."

Une main accroche le téléphone, l'autre repousse ce qui encombre la table. Le briquet claque, la braise crépite longuement quand il aspire une longue bouffée et qu'on perçoit le sourire qui fait ondoyer la voix très douce, un rien cassée, qui dit :

- Tout ce que tu veux, azizam. Raconte. Qu'est-ce que tu as fait comme bêtises, encore ?

On entend le sourire se tendre avec ses mots, comme pour franchir l'espace et la distance qui les séparent. Victoria ne l'aurait pas appelé avec cette voix-là, à cette heure-là, si ce n'était pas grave, et la douceur, elle est aussi là pour tarir l'inquiétude qui prend comme un feu de paille au fond des entrailles.

Allons bon, quel drame encore ?
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Dim 8 Nov - 3:06

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Habitation permanente : À Old Fyre, dans l’appartement qu’elle partage avec Tullio et Elana Cavaleri. Elle a aussi un appartement en Italie.
Occupation : Anciennement détective, maintenant chevalière à temps plein et maman.
Victoria Machiavel

Victoria Machiavel
La voix de Nour est une étreinte dans laquelle Victoria se dissout un peu plus, malgré elle, en ces vagues qui voudraient la submerger, la faire chavirer, et qui lui font au moins chercher son souffle et respirer trop fort, sporadiquement, juste quand elle parvient à garder la tête hors de l’eau; elle est aussi une bouée contre laquelle elle se love, comme le fait sa joue qui se presse contre le combiné, en dépit des éclaboussures qui lui coulent un peu de sous les cils.

Elle aurait voulu fuir.

Nour avait bien connu Olivia, et il connaissait aussi sa fille: en l’appelant, elle s’était sciemment tendu un piège duquel elle ne pourrait pas se tirer, ce qui ne l’empêche pas de tirer un peu sur ses propres chaines.

- Je vais bien, se convainc-t-elle plus qu’elle ne veut le rassurer lui.

Si Victoria ne pleure pas vraiment, c’est seulement parce que ses yeux sont fermés. En parallèle, quand retentit le cliquètement du briquet, elle prend une profonde inspiration en suivant le souffle calme qui, à l’autre bout du fil, aspire le tabac dont elle sentirait presque l’odeur familière.

Dans d’autres circonstances, elle aurait bien volé une cigarette à Tullio pour fumer aussi.

- Je ne sais pas comment… Par quoi commencer, se confond-elle avant de fondre dans un silence qui tremble, parce qu’elle est terrifiée, et qui hurle aussi, parce qu’elle commence à se fâcher contre elle-même.

- Je suis enceinte, lâche-t-elle finalement, presque sèchement, après avoir laissé la frustration organiser son émoi. Cependant, d’ordre il ne reste pas grand-chose après cet aveu qui éclate comme un sanglot étouffé.

Ce n’était pas vraiment ça, le problème, mais c’était déjà une bonne amorce.
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Mar 10 Nov - 18:31

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Habitation permanente : Living Mirage, Old Fyre, et entre les deux.
Occupation : Chercheur en tout.
Nour Alizadeh

Nour Alizadeh
- Le début, azizam, le début, assène Nour, tout calme, tout doux, du fond de ses vapeurs et de l'obscurité.

Il entend son souffle, qui se calque sur le sien alors qu'il respire, longuement, la fumée qui crépite sur la braise. Alors il respire, encore, à longues gorgées qui sifflent dans sa gorge, comme pour la bercer un peu. Finalement, elle finit par percer l’abcès et cracher le morceau, mais Nour ne sait pas très bien encore s'il doit s'en réjouir, alors quand il entend les mots qui ont tant de fois résonné à ses oreilles, il se lève comme s'il était monté sur ressorts et se met à arpenter la pièce.

Dieu doit avoir les oreilles qui sifflent, un petit peu, pendant qu'il en invoque les grâces, toutes les grâces, énumérées dans un même souffle précipité.

- Toria, dis-moi que c'est une bonne nouvelle, pourquoi j'ai l'impression que ça n'est pas une bonne nouvelle ?


C'est qu'il voudrait bien se réjouir encore d'être un petit peu grand père, une fois de plus, et surtout presque grand-père de cet enfant-là. Quand enfin la parole lui manque, qu'il s'appuie à la fenêtre close sur la nuit citadine, il regarde son reflet qui miroite sur le verre irrégulier et le fixe en retour, à travers l'ombre, les années, le clair de lune sur les toits. Sa main remue furieusement ses cheveux noirs, sans se soucier des cendres qu'il laisse accrochées à ses boucles déjà poivre et sel.

- Pleure pas, petite, j'ai le cœur qui vire, quand tu pleures.


La voix est douce encore, toute douce, toute tendre. La cigarette retrouve le coin de sa bouche, la braise flamboie contre la vitre, et tout au fond, il sait déjà à quel point ce dont Victoria aurait eu besoin, là, tout de suite, c'est surtout de sa mère.

Olivia aurait du être là, elle aurait sans doute su mieux que lui trouver les choses à dire. Mais voilà, Olivia n'est pas là et Nour se retrouve, loin de tout, à mille kilomètres de distance et quelques fuseaux horaires d'elle, à essayer de combler au mieux les manques et les trous dans ces vies disparates qu'on a cousues entre elles pour faire un semblant de famille. Son absence se fait d'autant plus criante, elle hurle dans le silence mais malgré tout, la douceur ne déserte ni la voix ni le souffle, quand il écoute. Tout patient et tout calme, car après tout, s'il n'est pas cela pour elle, à quoi bon ? Sa main tremble pourtant un tout petit peu, fait vibrer le poinçon de lueur entre ses phalanges usées.
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Dim 15 Nov - 8:00

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Habitation permanente : À Old Fyre, dans l’appartement qu’elle partage avec Tullio et Elana Cavaleri. Elle a aussi un appartement en Italie.
Occupation : Anciennement détective, maintenant chevalière à temps plein et maman.
Victoria Machiavel

Victoria Machiavel
Un sourire aux lèvres et des éclats pétillants plein la bouche, Olivia avait eu tôt-fait d’enseigne à Victoria à rire, en toutes circonstances, plutôt que de pleurer. Pourtant, aujourd’hui, les larmes s’accumulent sous les paupières et débordent, malgré elle, et malgré le souffle qu’elle aspire et retient. Ça prend bien la question de Nour, absurde à ses oreilles, ainsi que toutes les contractions qui forment un semblant de réponse pour que s’embraye lentement ce mécanisme hilare.

- C’est une bonne nouvelle, hoquète-t-elle, avec tout le paradoxe qui règne entre les larmes et les mots pour alimenter un éclat de rire, comme une étincelle, qu’il s’attise et se transforme en incontrôlables esclaffements saccadés.

Elle rit, elle pleure, et le reste est une confusion dans laquelle s’embrouillent les rires, les sanglots et les paroles au sujet du travail, du test de grossesse, d’Even, du bébé, d’Emanuel, de la fatigue, d’Ambrose, de sa mission et du danger. Victoria se parle plus qu’elle ne parle à Nour, en vérité, mais seulement parce que le calme de ce dernier devint cette ligne directrice qui l’oblige à organiser sa pensée, même si tous ses réflexes naturels voudraient plutôt la guider vers la fuite et le déni.

- Je veux le bébé, reprend-elle, étourdie, après avoir retrouvé un peu son souffle, mais je ne sais pas quoi faire du père.

Au tournant d’un vertige, Victoria se laisse tomber à la fois sur le canapé et dans un soudain mutisme. C’est qu’il y, dans tout ceci, beaucoup de choses tapies dans le non-dit, et Olivia n’a pas besoin d’être là pour qu’ils sachent tous les deux ce qu’elle aurait eu à dire à ce sujet.

- Si ma mère… Commence-t-elle prudemment avant de mieux se taire, parce que, ça, c’était un autre territoire dangereux qu’elle n’était pas certaine de pouvoir traverser dans son état actuel. Il n’empêche qu’elle s’était toujours un peu demandé ce qu’il pensait vraiment des rumeurs, ainsi que de ce qu’il avait pu ressentir, à l’époque, même si entre eux deux, somme toute, la vérité ne changerait pas grand-chose aujourd’hui.

Probablement pas grand chose, réitère-t-elle face aux secondes de silence qui voudraient la narguer.
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Sam 28 Nov - 17:40

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Habitation permanente : Living Mirage, Old Fyre, et entre les deux.
Occupation : Chercheur en tout.
Nour Alizadeh

Nour Alizadeh
"Ne pleure pas," dit le vieillard à la jeune, à l'étoile, et l'étoile adoucit ses larmes d'un rire qui force et qui perce, toujours, derrière le rideau des pleurs. Il l'écoute encore, faire de ces bruits mouillés qui lui chavirent le cœur et qu'il n'arrive plus très bien à distinguer parce qu'à la toute fin, tout se mélange et il y a des émois si intenses qu'on ne peut plus tout à fait trouver la différence. Nour se réjouit, au fond, comme se réjouissent les vieilles gens : avec l'allégresse de ce qui vient, et la mélancolie du souvenir de ce qui n'est plus.

C'est le silence qui vient, il sait, et l'enveloppe de son écoute même à travers les milliers de kilomètres qui les séparent. Au bout du fil, les indices sont là : pas un vrai silence, non, pas le mutisme qui ne fait pas un son, pas un geste, pas un bruit, non. Il écoute, on l'entend, on perçoit l'oreille tendue et les touts petites traces de sa présence. Le souffle qui siffle, la fumée qui crépite, braise chauffée, allumette grattée, embrasements de tabac, vapeurs de café renversé sur la porcelaine ébréchée qui tinte sur le bureau.

Finalement elle s'arrête, dans une conclusion qui arrache à Nour un rire sincère, quoiqu'un brin contrit. De quoi sont-elles donc faites, ces femmes de feu et de lumière qui font mentir tout ce que on a pu médire sur la faiblesse de leur sexe ?

- Oh seigneur, tu es bien la fille de ta mère. Pas de doute.

Et puis il se tait, il se taisent et l'absence s'engouffre dans l'interstice de leurs paroles, comme un vent glacé qui cherche la fissure et emplit tout, l'espace d'un instant. Nour se reprend, le premier. Il a l'habitude. C'est moche à dire, mais ces moments-là qui étreignent le ventre, ces poignes de fer et d'os, froid glacial au fond des tripes, il les connaît bien. Est-ce que c'est ça, de vieillir ? S'habituer enfin à la mort des autres, à leur absence, au vide ?

Il a la voix douce encore quand il reprend, mais elle s'érode d'un rien de peine.

- Si ta mère était encore là, elle te dirait de faire ce qui te chante, azizam, tu sais bien. Elle te l'a toujours dit et, Dieu la garde, c'est ce qu'elle a toujours fait. Tu t'en rappelle, pas vrai ? Elle disait "Toria, écoute tes tripes, elles savent mieux que toi ce qui est bon".

On entend son sourire qui creuse et ravine les joues, les yeux, la commissure des lèvres qui tire des rides profondes. Il se tait encore un peu, et il reprend, à mots soigneux, précautionneux :

- Y'a comme une habitude d'élever les marmots toutes seules, dans la famille, mais toi tu t'es mise dans un sacré pétrin, quand même. Tu sais que tu peux le faire, quand même : garder le bébé, ne pas garder le père, et n'en faire qu'à ta tête, comme toujours.


Une pause.

- Tu devrais en parler à Catherine, tiens.

Est-ce que ça picote, au fond ? Tout au fond, là, trente après s'être entendu dire que c'est très bien tout ça, mais tu ne feras pas un bon père, Nour, aussi fort que tu le veuille, ça ne suffit pas. Fermement, mais doucement, comme on enfonce un clou dans un cercueil. ça fait presque mal, encore, comme un fantôme de cicatrice.

Ah. La mémoire est une sacré traîtresse.

- Moi, tu sais, je ne prendrai pas le risque de contrarier ta mère en te disant autre chose. Fais ce qui est bon pour toi, et pour ton petiot. C'est que tu es presque maman, maintenant.

Il s'interrompt et on l'entend marmonner à demi pour lui-même, ah, seigneur, très miséricordieux, tout miséricordieux ! Et on l'entend rire, encore, de ce rire incrédule que provoquent les miracles et les choses inespérées.
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Jeu 14 Jan - 23:45

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Habitation permanente : À Old Fyre, dans l’appartement qu’elle partage avec Tullio et Elana Cavaleri. Elle a aussi un appartement en Italie.
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Victoria Machiavel

Victoria Machiavel

Les doigts de Victoria sont crispés autour du téléphone et elle s’accroche à la ligne pour mieux saisir les bruissements rassurants du papier, les cliquètements de la porcelaine et le souffle enfumé de Nour.  Enfin, le rire sobre du vieil homme perce ce silence assourdissant et Victoria y fait échos avec quelques éclats désemparés. Il amène de bonnes réponses, sans doute… Mais pas à la question qui lui avait presque brulé les lèvres, qu’elle avait ravalée et qui, comme une boule acide dans sa gorge, ronge et embrase progressivement et le cœur et l’esprit.      

- Mais ma mère n’est plus là, articule-t-elle avec des syllabes un tantinet pointues, avant de reprendre avec des consonances pleines d’amertume, et je sais très bien comment elle a géré la même situation.  

Il y va un détour inopiné vers la colère dans sa progression mentale. C’est sans doute parce que la situation – l’absence criante d’Olivia – l’empêche de se vautrer dans le déni habituel.    

La suite s’égare ; les dernières paroles de Nour se perdent dans l’amphigouri de ses réflexions et dans le souffle cynique de son propre sourire désemparé.

Ça lui tourne dans la tête et ça hurle.

Et toi, Nour, qu’est-ce que tu aurais préféré?
Et Victoria, elle, qu’est-ce qu’elle aurait voulu?  
Et Olivia, avec du recul? Si la situation lui avait convenu de son vivant, Victoria se demande bien ce qu’elle en penserait maintenant. Assurément, elle n’aurait pas aimé voir l’état émotionnel dans lequel fille se retrouvait aujourd’hui.

- Je ne sais pas si je veux du père dans ma vie… mais je ne sais pas si je veux que mon enfant grandisse sans lui.

Nour ne prendrait pas le risque de contrarier Olivia, mais il est là quand même – et il avait toujours été dans sa vie, en vérité – ce qui est déjà quelque chose.

- Si je coupe les ponts avec Emanuel et Even, ce sera pour de bon... Pas comme avec… Nous.  
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Ven 15 Jan - 12:23

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Nour Alizadeh

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- Ta mère a fait ce qu'elle voulait d'abord, et ce qu'elle pouvait ensuite, réplique Nour, calmement. On sait tous les deux ce que ça fait d'être d'un côté et de l'autre, maintenant, ça n'est pas une décision facile.

Il y a de la gravité, soudain, dans le fond de sa voix. Il entend tout ce qui vire et écorche celle de Victoria, sans comprendre quelles harpies sont en train de faire leurs griffes sur sa pensée et aiguisent la colère dans ses mots. Il respire, il souffle, paisible toujours, même quand ces intonations douloureuses lui attaquent les tripes au canif.

- Il n'y a peut-être pas de bon choix,
lance-il, au bout d'un moment. Quoi qu'il arrive, il y aura des défauts. Y'aura toujours des choses qui vont pas et personne n'y peut rien, à part faire de son mieux. Et puis, le sang, c'est le sang, mais toi et moi on sait bien qu'il n'y a pas que ça pour faire une famille, alors, peut-être que ton rejeton aura quand même un père, ou peut-être deux, qui sait ?

C'est frustrant, de devoir passer par le tamis étroit de sa bouche et de ses pensées quand il y a tant à lui dire. Il ne sait plus par où procéder et commencer tant tout s'agite et lui tourne dans la tête, et même s'il lutte pour garder le fil, il a l'impression que ça ne sera jamais assez, qu'il manque encore tant de choses.

- Je sais que c'est pas facile. C'est moche, c'est moche pour tout le monde parce que même si ça fait mal de se faire claquer la porte au nez, ça n'est pas beaucoup plus plaisant d'élever un marmot toute seule. Ton gars Emmanuel a l'air d'un brave type, peut-être qu'il faudrait aussi que tu lui dise ce que tu as sur le cœur, même si ça va pas lui plaire. Il y a peut-être une solution à trouver, et je sais que c'est pas ton genre, Toria, mais tout n'a pas à être tranché dans le vif sans compromis. Il mérite peut-être mieux qu'une fin de non retour, et toi aussi, et ton gosse aussi.


Une pause, il respire encore, et écrase son mégot dans une pincée d'étincelles qui déposent des cendres sur le bout de ses doigts. Il s'est rassis dans sa chaise de bureau toute grinçante, qui couine et qui roule sur le plancher quand il se rapproche du bureau pour attraper son paquet de cigarettes. Ses yeux fixent le plafond, et on entend de nouveau le briquet qui claque dans le noir.

- Je crois que j'aurais voulu pouvoir en parler, moi aussi.


La voix pensive lui échappe, et il se rend compte que c'est sans doute la première fois qu'il l'évoque, cette blessure à demi avouée, cette lame de rasoir qu'il a avalée tout rond en souriant et en disant que ça n'était pas bien grave, il l'avait bien cherché. Le dossier grince quand il s'étend de tout son long et rejette la tête en arrière, un filet de fumée entre les lèvres.

- Je crois bien que j'aurais voulu pouvoir dire quelque chose quand Catherine m'a dit qu'Adèle serait sa fille, sa fille à elle, et qu'elle se passerait de moi. Je ne sais pas vraiment quoi, simplement... ne pas être mis devant le fait accompli. Avoir l'illusion du choix, même si le sien était déjà fixé.

Non sans honte, il se rend compte que même si Olivia s'embusque encore dans leurs silence, son nom qui rôde au bout de la langue, il ne le prononce plus. Il n'ose pas évoquer le doute, il n'y arrive pas encore, c'est fou, après trente ans : il n'arrive pas à se dire que qu'Olivia n'a peut-être rien dit tout ce temps et a emporté son secret avec elle, et il n'arrive pas non plus à le lui dire, à Victoria qui doit bien s'en douter, elle aussi.

Sa voix se fait douce, toute douce, une berceuse qui l'enveloppe, même pour lui dire des choses qui ne lui plairont sans doute pas.

- Je sais que tu n'en feras qu'à ta tête, azizam, parce que c'est ce que tu fais toujours. Mais peut-être qu'il est temps que tu comprenne qu'on n'avance pas en brûlant tous les ponts derrière soi. Il y a des choses à sauver avec Emmanuel, et même si ton Even m'a l'air d'être un aimant à emmerdes, c'est pas en t'arrachant le coeur et en brisant celui des autres qu'on construit des choses.
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Dim 7 Fév - 14:07

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Victoria Machiavel

Victoria Machiavel
Peut-être deux, qui sait ? Peut-être même encore plus que ça, en vérité, sans parler des mamans additionnelles et passagères, des grands-parents de cœur, des oncles et des tantes innombrables, dont les liens de sang, comme l’a dit Nour, importeront bien peu. C’est inévitablement ce qui arrive quand on amène au monde un enfant dans un milieu comme le leur, où tout le monde sait que le sang, à la fin, ne sert bien qu’à couler.

- Je sais. Je sais…

Victoria sait, et pourtant l’incertitude s’infuse encore dans sa voix, aussi certainement que la fumée à l’autre bout du fil. Familière et étouffante, elle l’attrape par la gorge et lui coupe le souffle, si bien que même les inspirations lentes et profondes qu’elle s’oblige à prendre ne semblent jamais satisfaire ses poumons crispés.

Fondamentalement, Nour a raison et Victoria entend bien ce qu’il lui dit : avec tous ces liens de cœur, la prérogative du sang ne pèse finalement pas beaucoup. C’est sans doute vrai, et pourtant, et pourtant: son poids écrase quand même toute logique au terme d’une violente dégringolade émotionnelle pavée d’instincts qui ne se contrôlent pas. Olivia, elle, avait réussi à appliquer cet étrange mode de vie à sa manière; Victoria aurait même dit, si on le lui avait demandé quelques années plus tôt, que sa mère l’avait appliqué avec brio. Aujourd’hui, néanmoins, elle était loin d’en être aussi certaine et, sans trouver les mots précis pour le dire, c’était bien à la source de toutes ces angoisses.

- Mais je pense que voudrais faire mieux.

Il y a des plaies qui ne guérissent jamais, que l’on couvre, que l’on cache et qu’on ne peut que suspecter chez les autres. Voilà que Nour lui en dévoile enfin une dont elle soupçonnait et redoutait justement l’existence. Son mentor parle donc et, sur le combiné, ses doigts se serrent et son oreille se presse. Dans le silence interminable qui survient entre ses paroles, on entendrait presque les battements étourdissants de son cœur à l’affut ; celui-lui sent bien la vérité qui se tapit dans le silence, embusquée et sournoise, mue par l’envie pressante de bondir au grand jour pour leur déchiqueter le coeur.

Sa gorge est nouée et la déglutition se fait difficilement.
Il parle d’Adèle, évidemment.

À l’intérieur, il y a quelque chose qui se calme, qui s’étourdit et qui respire après avoir retenu son souffle. Une autre, cependant, dont Victoria ne suspectait pas l’existence, se dévoile en se serrant un peu plus. Ça vient au passage mettre des mots sur certaines de ces incertitudes : c’est qu’Olivia n’est plus là et qu’eux se retrouvent terriblement seuls... Même ensemble, manifestement, ils n’arrivent bien qu’à être seuls en concert.

- …Tu as raison, concède-t-elle avec un soupir qui se transforme, dans les mots suivants, en éclats de rire dépité, évidemment que tu as raison. À quoi d’autre est-ce que je m’attendais en t’appelant.

Elle ne lui parlerait peut-être pas tout de suite – ça, elle n’était pas prête – mais elle trouverait bien une façon de mettre leur relation sur la glace en attendant de l'être.

- Even, c’est mieux pour tout le monde que je le laisse en dehors de tout ça, mais Emanuel… Je vais trouver quelque chose. Faire mieux, on est d'accord que ça commence par… Dire quelque chose tout court, n'est-ce pas?

Très légèrement, elle rit à nouveau, cette fois avec un pétillement quelque peu désabusé.
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Jeu 11 Fév - 15:50

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Habitation permanente : Living Mirage, Old Fyre, et entre les deux.
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Nour Alizadeh

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Nour rit, lui aussi, et le barrage cède un peu, le fleuve se fait grondement de miel qui roule dans la gorge enfumée. C'est fou ce qu'il donnerait, le sang, la chair, les diamants et l'or, pour l'entendre encore, ce rire, surtout quand il vient après les larmes et le doute.

- Il faut bien que tonton soit là pour avoir toujours un truc à dire, pas vrai ?


Son sourire transparait dans sa voix, dans ce qu'il ne dit pas sans doute, parce que ça lui crève encore le ventre. Mais il y a de l'amour, dans ces mots, un amour qui peut-être se passe bien de savoir quel mot lui coller dessus. Si c'est celui d'un père, d'un oncle ou d'un parent quelconque, à quoi bon, vraiment, quand il brille à ce point ? Au creux de la nuit qui s'attarde, dans la lueur qui danse, Nour se dit qu'à la fin ça n'a peut-être pas tant d'importance quand il arrive à trouver les mots pour rassurer Victoria et répondre à ses craintes. ça suffit, lui souffle le cœur, ça suffit bien amplement.

- Je sais que c'est pas quelque chose que j'ai réussi à t'apprendre, malgré toutes ces années, reprend-il, avec une douceur moqueuse et très tendre. Parler, ça t'a toujours été un peu compliqué, pas vrai ? Je sais que c'est dur, petite, mais il faut passer par là, c'est bon remède. Il tord le ventre, mais ça fait du bien, juré.

C'est que le silence, il pèse, parfois. Il y a tant de choses qu'il aurait voulu avoir dites, qu'il aurait voulu entendre, tant de choses qui aurait été tellement plus simples, avec quelques mots. Il y aurait sans doute un peu moins de fantômes, dans le mince interstice qui les sépare, peut-être un peu moins de questions et de peurs.

- Et puis, tu n'es pas toute seule.
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