« Je vais t’arracher les yeux, Klaus, j’te jure... »

Eliza marmonnait dans la barbe qu’elle n’avait pas des insultes en tout genre, plus ou moins mignonnes, dans sa langue natale, tandis qu’elle avançait dans les rues de la ville. La nuit tombait, elle avait mis au bas mot deux heures à se tirer de ce maudit sous-sol, et elle était très en colère.

Sans surprise, Klaus en était la cause.

Elle le savait, pourtant, qu’elle n’aurait pas dû faire équipe avec lui, qu’elle n’aurait pas dû se laisser attendrir par ses gestes en apparence si doux. Il était un requin, et il ne l’avait fait que dans son propre intérêt. Elle bouillonnait intérieurement, parce qu’elle savait qu’elle ne pouvait pas lui faire confiance sur ce genre de choses.

Ses vêtements, initialement de jolies couleurs, se retrouvaient tâchés de poussière, à l’instar de sa peau, et elle était à présent décoiffée. Sa main saignait moins à présent, mais elle devait nettoyer la plaie. Et elle comptait le faire.

Après avoir retrouvé son traître de coéquipier.

Heureusement, Eliza connaissait Klaus. Elle connaissait son fonctionnement, et elle savait qu’il ne pouvait qu’être à l’hôtel. Il ne restait plus qu’à trouver sa chambre, il fallait seulement espérer qu’il ne s’était pas embêté à utiliser une fausse identité.

Elle s’arrêta devant une vitrine qui lui renvoyait une image d’elle trop désordonnée, et soupira. Trouvant une boutique de fringues, elle acheta une robe propre et profita de la cabine pour se nettoyer un peu. La vendeuse lui proposa même, un peu inquiète, de soigner sa main, et Eliza accepta une compresse, mais rien de plus. Elle ne voulait pas prendre le risque de perdre Klaus, qui allait potentiellement se volatiliser.

Vêtue d’une robe, désormais un peu plus propre, elle courut jusqu’à l’hôtel et reprit son souffle devant afin d’entrer, voilant son joli minois d’un sourire avenant et radieux, et s’avança à la réception pour demander, visiblement ravie, la chambre de son ami Klaus Albrecht, qu’elle avait croisé en ville, et puis ça faisait si longtemps qu’il n’était pas passé qu’elle avait été ravie d’apprendre qu’il était en ville…

Et bien entendu, son air jovial et son flot de paroles avaient aidé à ce que l’hôtesse d’accueil ne se pose pas de questions. Elle donna le numéro de chambre, et Eliza remercia chaleureusement la dame, qui n’avait pas pu remarquer l’éclat dans le regard de la comédienne. Un éclat déterminé, et colérique.

Elle monta les étages et finit par arriver devant le numéro qu’on lui avait donné. Elle attrapa un chariot de service d’étage et l’attrapa pour que ce soit la première chose qu’il voit si jamais il ouvrait la porte, puis elle toqua, trois coups légers, malgré le fait qu’elle aurait voulu tambouriner comme une demeurée.

« Service de chambre ! » annonça-t-elle d’une voix plus grave et tranquille que la sienne, pour que Klaus ne se pose pas de questions. Pas trop, en tout cas.