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Un Refuge aux portes du Nouveau Monde.

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Mar 28 Juil - 17:48

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'Nami Hergalt

'Nami Hergalt
Une porte qui claque et les carillons s’emballent. Une furie pastelle dévale les étales exigus, faisant voler dans sa fougue plantes séchées et autres parchemins. Ses Docs nacrées impriment sa colère sur le sol et c’est d’un poing sur le comptoir qu’elle ponctue tout ce tonnerre. Derrière elle, la vision d’une boutique brisée comme sa confiance. « Il faut qu’on parle. » Son regard assassin planté dans les yeux de jais de la sorcière. Devant elle, tout y est : la peau grise craquelée, couverte de rides, le nez crochu et difforme, des ongles longs comme des griffes, sales et fissurés, un sourire carnassier et des oreilles qui se recroquevillent vers le sol. Maintenant, elle peut voir sa vraie forme – un gobelin ! Quoi ?!

Bzzz bzzz.

‘Nami fixait son verre, totalement perdue dans ses pensées, son diabolo menthe attendant tranquillement son heure.

Sans doute un chouïa trop dramatique...

Elle était là depuis un moment maintenant, plantée en terrasse dans une rue sans importance, avec une vue imprenable sur une ruelle encore plus inconséquente. D’ici, elle voyait la boutique, sa petite vitrine et le dédain des passants. Elle voyait les fenêtres aux étages, leurs rambardes en fer forgé et le souvenir de sa silhouette accoudée des heures durant. Cela ne faisait pas si longtemps, elle avait pourtant une impression d’éternité – que le monde avait eu le temps de totalement changer. Elle savait que cela se reproduirait lorsqu’elle passerait ce seuil, encore une fois.

Alors elle guettait.

Depuis qu’elle avait rencontré Malaury, tout était différent. La découverte de la Magie, la vraie, les créatures vivant parmi les humains, tout ça était nouveau – et pourtant étrangement familier. Et depuis, elle tournait en boucle sur une question. Que savait Saskia ? Si une personne parmi ses contacts, parmi toutes les entrevues ésotériques qu’elle avait fait, parmi les vendeurs de rêve et de réconfort, si une personne savait, c’était elle. C’était elle parce qu’elle n’entrait dans aucune autre case. Elle n’avait pas fait d’article à son propos, elle n’avait pas étudié ses pratiques à la recherche de l’entourloupe certaine. Elle avait frappé à sa porte un soir avec une valise ; elle était revenue transformée.

Alors elle guettait – et quelqu’un sortait !

Elle saisit son téléphone. Oh, un message de Mal’ – plus tard. En un mouvement, elle avait zoomé sur la personne. Des oreilles pointues, disproportionnées et couvertes de fourrures. Une créature, elle le savait ! Elle avait même un plan parfait sur ses yeux parfaitement dorés percés de minuscules pupilles, qui regardait droit l’objec-… Quoi ? Elle reposa son portable aussitôt mais le mal était fait ; la créature avait disparu.

Sa menthe lui paraissait bien amère.

Qu’avait-elle fait ? Elle se sentait nauséeuse ; son estomac noué, sa respiration rendue difficile par une compression inexplicable. Elle avait envie de jeter son appareil contre un mur – aussi inutile que ce soit. Elle observait l’écran noir qui lui renvoyait son reflet encadré. Elle observait son propre regard pesant, cette impression impérieuse, ce mépris d’un instant. Elle se revoyait, elle franchissant ce seuil pour sortir la première fois – une bête de foire. Voilà ce qu’elle en avait fait.

Elle avait beau se dire qu’elle attendait de confirmer ses doutes, qu’elle observait juste pour s’assurer des faits ; maintenant que c’était certain, l’illusion ne tenait plus. Elle avait juste peur – peur d’avoir face à elle un mensonge, peur de s’être reconstruite dans la duperie, peur de perdre une de ses rares zones de confort. Elle avait peur, et maintenant elle devait y aller ; comprendre et corriger.

Alors elle frappe à la porte.

Les carillons tintent un instant et la porte se referme dans un léger sifflement. Les vitrines n’ont pas bougé et elle se retrouve à observer les pierres. Une main distraite joue avec une mèche aux couleurs de bonbons. Les améthystes sont toujours si belle ; elle prend un grande inspiration avant de se détacher de la distraction. D’un pas timide, elle s’approche du comptoir, ses yeux ne se décollant pas de ses lacets pailletés. Lorsque son visage se redresse, un frisson la parcourt. Rien n’a changé.

« Il f-... »

Un sanglot.

L’apprentie s’approche de la sorcière, pose sa tête sur son épaule, et laisse les larmes couler.
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Mer 29 Juil - 18:20

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Habitation permanente : Un vieil immeuble parisien
Occupation : Commerçante
Saskia Alvarez

Saskia Alvarez
Rien n'a changé.

Rien ne change jamais. Les odeurs, les sons, les textures : comme si le temps, capté par l'atmosphère feutrée du lieu, ralentissait sa course. Comme si quelque chose, ce mélange de parfums vieillis, de bois patiné et de sons délicats était de nature à arrêter la course du temps et du monde et à demeurer inchangé malgré les années, voire les décennies. C'est le même sentiment qui prend à la gorge, un mélange de nostalgie et de joie, le même qui surgit de derrière les souvenirs et se dissimule en embuscade dans un parfum anodin ou une sensation qui réveille des choses enfouies dans les tréfonds.

C'est que le lieu est un refuge, depuis si longtemps, pour tellement d'âmes, qu'il se rappelle pour toujours de ce qu'il est, à qui il appartient, et que la boiserie centenaire a bu tant de larmes et tant de confidences qu'elle exsude une mélancolie un rien austère, mais accueillante. Finalement, c'est à l'image de toutes les femmes qui se sont un jour tenues ici, à la place d'honneur, dans le fauteil en rotin coincé entre le comptoir et des étagères vertigineuses remplies de pots étiquetés de noms savants.

Aujourd'hui, rien n'a changé, et c'est un visage familier qui pointe du nez. Saskia s'est levée et le silence, et ses bras, enveloppent la jeune femme, parce qu'elle sait que parfois, il faut attendre un peu que l'averse passe. Rien ne change. Elle se souvient d'elle, comme elle se souvient de toutes les autres et sans doute que la texture même du vêtement est identique, la même noirceur qui tisse la robe, les franges du châle et les perles des bijoux, le même parfum sourd et capiteux qui imprègne chaque fibre, le souffle lent et profond qui anime le giron où la tête s'incline. Dans le plumage de la mère corneille, on trouve un refuge inexpugnable.

- Là, là, cariña mia, murmure-elle en berçant 'Nami.

Et puis, avec douceur mais fermeté, elle s'écarte d'elle et la regarde un instant, gardant ses longues mains posées sur ses épaules. Un sourire file sur la figure sévère, fugace, discret : il éclaire brièvement la profondeur de ses yeux lourdement fardés, émousse le tranchant du visage.

- Bon, une tasse de thé et tu vas tout m'expliquer, d'accord ?


C'est bien entendu dans la cuisine, à l'arrière de la boutique, que les confidences doivent avoir lieu. En passant, Saskia demande à ce qu'on prenne son relai au comptoir et qu'on la fasse chercher si besoin, puis elle laisse 'Nami s'asseoir avant de s'atteler à remplir une théière. Très vite, comme toujours, la porcelaine pansue et ébréchée fume sur la table, dans cet antique service dépareillé qui embaume le petit espace de la pièce. La lumière du jour coule par la petite fenêtre et tombe sur les carreaux de la nappe brodée, fait jouer les reflets sur la vaisselle, joue dans les volutes de vapeur qui s'élèvent des tasses. La maison vit et respire autour d'elles, comme un cocon de pierre et de bois qui grince à l'étage, à travers les épaisseurs des planchers et des escaliers où résonnent des bruits de pas, des conversations, de la musique étouffée qui filtre ça et là dans un bourdonnement très doux.

Saskia s'assied enfin et croise les bras sur le bord de la table. Son regard perçant semble traverser sa vis à vis, comme pour lire à travers elle, avec cette acuité coutumière qui découpe des traits âpres malgré leur apparence encore juvénile. Les années ont passé sur elle sans même l'effleurer, et le crin épais de la chevelure tirée en chignon ne se faufile d'aucune blancheur perceptible.

- Allez, je t'écoute, nena.
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Sam 1 Aoû - 20:01

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'Nami Hergalt

'Nami Hergalt
C’était comme plonger dans l’abîme, une mer d’encre au noir prononcé, entêtant – réconfortant. Là, elle pouvait lâcher prise, laisser ses sens couler. Bientôt, elle ne sentirait plus ses mains trembler, son nez se noiera dans des embruns beaucoup trop forts et dans sa gorge, seul survivra un arrière goût de sel. Là, elle était en sécurité, pouvait laisser une à une les barrières tomber. Elle aurait simplement pu rester ainsi toute une vie, dans cette bulle hors du monde. Mais la surface revint, une légère pression sur ses épaules pour qu’elle émerge.

‘Nami soupira. D’un revers de main, elle débarrassa ses dernières larmes, hésitantes aux bords de ses yeux. Elle fut surprise de garder son calme quand elle vit la traînée noire sur sa peau ; elle en sourit, Saskia l’avait vu en pire état.

La cuisine était comme dans ses souvenirs – comme exactement tout jusque là. Elle prit place sur sa chaise habituelle, de là elle pouvait laisser son esprit papillonner vers la fenêtre. Mais cela attendrait ; son attention était en quête d’un petit pot qui avait sûrement plusieurs fois son âge. L’instant d’après, elle l’avait entre les mains et soulevaient son couvercle pour s’assurer du contenu. Du sucre. Son ventre sembla aussi réjoui de la nouvelle. Sans doute avait-elle faim – plus tard.

Les tasses arrivèrent, et avec elles, son tour de parole. Elle était légèrement intimidée. Elle aurait pu aller directement à la raison de son malaise, ou simplement commencer dans le vif du sujet. Elle aurait pu ; mais ici, elle n’était pas pressée.

« … Alors reprenons depuis le début. »

Une grande inspiration, et la jeune femme retraça de manière beaucoup trop détaillée les derniers mois de sa vie. D’abord le journal, son accomplissent d’avoir enfin un contrat stable, la façon dont elle a géré ses entretiens, l’absence de retour négatifs véhéments sur ses articles «  – Mais je pense quand même que tu détesterais ce que j’y écris – ». Elle bu une gorgée, se brûla la langue. Elle enchaîna sur Aube et son blog du surnaturel. Ça ressemblait à une parenthèse sur son adolescence jusqu’à ce qu’elle raccroche ça à son nouveau travail. « Et donc, j’allais enfin pouvoir l’interviewer ! Enfin, c’est ce que je croyais... » Elle ne pu s’empêcher de décrire son enthousiasme – pourtant évident – et l’impatience d’enfin voir une de ses idoles. « C’est une des rares personnes, avec toi, à qui je dois qui je suis aujourd’hui. » Puis l’incompréhension totale, ce bar à chat et l’angora qui doit maintenant la détester. Elle avait vraiment l’air peinée. Marie-Malaury, la duperie d’Aube et la naissance d’une nouvelle amitié. Elle raconta l’escapade dans Paris sous la pluie, la joie des échanges de texto. Dans son exhaustivité fatigante, elle garda précieusement un détail pour la fin – la raison même de sa présence ici.  « Et Mal’ appartient à l’Ordre. »

Elle laissa sa phrase flotter dans l’air, entre les vapeurs de leurs boissons maintenant plus tièdes. Sa respiration en profita pour reprendre un rythme plus posé.

« Donc, je sais pour la magie, les chevaliers, tous ces trucs là. Je sais que les créatures existent – et il se peut que j’ai effrayé celle qui sortait de ta boutique juste avant mon arrivée. »

Elle déglutit difficilement en se rappelant la scène. Ses yeux remplis d’appréhension attendaient le verdict, suspendus au regard de la seule dont elle accepterait le jugement.
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Dim 2 Aoû - 8:03

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Habitation permanente : Un vieil immeuble parisien
Occupation : Commerçante
Saskia Alvarez

Saskia Alvarez
A l'autre bout de la table, Saskia trône, comme si elle ne pouvait s'asseoir nulle part sans donner cette impression. Ici s'étend son domaine, le coeur de son pouvoir, là où elle est toute puissante et où tout semble obéir à sa main et savoir que tout est à elle. Elle laisse un moment à 'Nami pour reprendre ses marques et retrouver les habitudes là où elle les a laissées, pour se mettre à l'aise comme il se doit. Pendant ce temps, elle observe, les yeux scrutent et détaillent en battant de leurs ailes poudreuses.

Enfin, la jeune femme entame son récit, capté par le silence de la sorcière qui se tait. Quelques réflexions, ça et là, lui arrachent un sourire un rien plus appuyé, font naître des expressions fugaces qui s'achève dans un petit rire de gorge alors qu'elle porte sa tasse à ses lèvres. Quelque part sous la chaise de la visiteuse, un chat se faufile furtivement et un autre museau pointe par la porte entrebâillé, avec une curiosité méfiante.

- Tiens donc, lâche Saskia en reposant la porcelaine dans la soucoupe. Je savais que tu finirais jour par découvrir la vérité, surtout après avoir passé autant de temps ici
-ce disant, elle oscille un peu du chef avec amusement- mais peut-être pas de cette façon. Je pensais que tu te doutais de quelque chose, en partant. On finit toujours par se douter de quelque chose.

Saskia croise les bras devant elle, et plante ses yeux noirs, très noirs, dans ceux de la jeune femme en face d'elle.

- Et c'est donc pour cela que tu es ici ? Je présume que tu dois avoir beaucoup de questions. A commencer, sans doute, sur la raison pour laquelle tu as vu une... Créature, sortir de mon magasin.

De nouveau, elle hoche légèrement la tête de côté, comme un oiseau contrarié. Le mot a une saveur bien étrange dans sa bouche, parce que très ironiquement sans doute que 'Nami a passé bien plus de temps avec la gente magique sous couverture qu'avec d'autres humains, fut un temps. Voilà ce qui est ennuyeux, avec les chevaliers : ils ont tendance à tracer une délimitation bien nette entre les mondes, sans se rendre compte que les choses, comme souvent, sont beaucoup plus subtiles.

- Rassure-toi, dit-elle avec un sourire étrange. Tu ne lui as sans doute pas fait peur. Le docteur Iossif n'est pas du genre à s'effaroucher de si peu, mais il n'apprécie guère être reconnu. D'ailleurs, je suis bien curieuse de savoir comment tu en es venue, toi, à percer le voile à ta manière : est-ce que ton amie t'a donné quelque chose pour cela ?

Après quelques miaulements insistants, la chatte qui rôde à leurs pieds finit par sauter sur les genoux de sa maîtresse, puis sur la table. Le matou est familier de la maison, tout le monde le connaît mais sans doute qu'il a bien changé aux yeux de 'Nami qui sait, à présent : il a toujours la même fourrure ocellée et la même silhouette longue et fuselée caractéristiques des chats sauvages, mais voilà qu'il s'auréole d'un éclat solaire et que le pelage se teinte d'une nuance d'or sourd et profond. Les yeux, qui fixent la journaliste avec curiosité, sont cernés d'épaisses lignes noires, comme tracées par un pinceau de khôl sur une amulette égyptienne.

- Tu reconnais Méryt, je présume ? Lance Saskia de sa voix indolente en flattant l'encolure de l'animal. Elle ne t'a pas oubliée, je crois.

Et de fait, la chatte vient renifler les mains de 'Nami, puis cherche à y blottir son museau et y frotter sa tête avec bonheur. Sa clarté éclipse presque celle du soleil qui se faufile par la fenêtre, et elle fluctue comme pour suivre le son qui ronronne dans la gorge couleur de miel.
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Sam 29 Aoû - 19:09

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'Nami Hergalt

'Nami Hergalt
Elle était fascinante.

‘Nami, mesmérisée, n’avait pas décroché son regard de la fourrure éclatante de l’animal – ou créature ; qu’importe, ses pensées étaient désormais bien plus claires. Elle avait l’impression que l’aura de lumière avait purifié ses tracas et sa culpabilité. Sans doute le crédit revenait à la sorcière sombre qui siégeait à l’arrière de son champ de vision dans un contraste saisissant. Mais dans l’instant, il n’y avait que Méryt et sa magnificence. Elle l’accueillit sur ses genoux et sentait son cœur se remplir quand les petits yeux accentués se fermaient à mesure des câlins et grattouilles dans son poil radiant.

Puis la salle se mit à clignoter.

Sans doute l’ampoule qui fait des siennes, pensa la jeune émerveillée. Il fallut que cela se produise deux fois de plus pour qu’elle se rappelle – elle n’avait pas été allumée en premier lieu. Les nuances d’or se perdirent dans les couleurs fauves, les traits maquillés se dissipèrent en taches irrégulières. En un rien de temps, elle voyait sur ses genoux la peluche de ses souvenirs – uniquement.

« Elle m’a passé des cachets qui durent quelques heures à peine... »

… Parce qu’elle les coupe en deux pour y revenir plus souvent, et qu’elle mange sans doute pas assez pour que ce soit efficace – détails. Elle sortit une petite boîte en plastique de son sac – un pilulier coloré. Continuant à cajoler le chat d’une main, de l’autre elle exécutait une série de gestes mécaniques, presque inconscients. Sa tasse dans sa main, une dose sur la langue ; une gorgée et elle continua.

« Mais il m’en reste plus beaucoup, t’façons. Et c’est peut-être une des motivations à venir directement ici. Je veux dire – évidemment que j’avais des doutes, mais rien de concret ? convaincant ? matériel ? Sûrement. Le genre d’intuition qui fait que les gens en face roulent des yeux et te mettent dans la case des gamines crédules, tu vois. Rien du niveau de ‘‘Woh, Méryt a mangé un soleil !’’ »

Elle avait été du genre à fabuler sur tout et n’importe quoi, à théoriser des explications abracadabrantesques et s’imaginer la magie à tous les coins de rue. Se dire que ce lieu était un littéral repère de sorcière était sûrement la première chose à laquelle elle avait pensé, et s’imaginer que le contexte de son changement transcendait une réalité banale avait un côté plaisant. Mais le monotone du quotidien avait su éroder sa fantaisie, la reléguer au rang d’imagination débordante – jusqu’à maintenant.

« Et donc, oui, j’ai plein de questions – c’est mon métier maintenant ! Est-ce que tu fais aussi partie de l’Ordre ? Qu’est-ce que tu utilises toi pour voir la vérité ? J’aimerais savoir tout ce que tu sais ! Et aussi… hum, pourquoi tu ne m’en as jamais parlé. »

La fin de sa phrase avait perdu son assurance pour s’étouffer en regard fuyant. Elle baissa les yeux, intimidée. Mais son visage s’éclaira tout de même ; le soleil se levait à nouveau dans le creux de ses mains.
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Mar 1 Sep - 16:43

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Habitation permanente : Un vieil immeuble parisien
Occupation : Commerçante
Saskia Alvarez

Saskia Alvarez
Saskia rit, tout doucement. Elle ne cesse d'observer 'Nami avec une sorte de tendresse sage et amusée, avec un peu de douceur, aussi, qui émousse le tranchant de sa figure sévère. Les émotions perturbent peu ce visage taillé dans le marbre : elles y passent, comme les ondes sur une eau profonde, il faut pouvoir les lire et les déchiffrer, tout comme il faut savoir lire ses silences, quand ils s'attardent dans l'air feutré de lumière.

- C'est ton métier, oui, oui, c'est bien naturel, après tout.


Elle oscille du chef, comme si elle jaugeait la jeune femme, et mesurait en pensée la profondeur des secrets pour savoir ce qu'elle pouvait lui dire, et ce qu'elle devrait garder sous silence, pour leur bien à toutes les deux.

- La vérité n'est pas si différente de ce que tu as déjà pu voir quand tu as vécu ici, répond-elle. Mais avant d'en dire plus, je dois souligner une évidence que tu sais déjà probablement : tu ne dira rien de tout cela.

Ce n'est pas une question, ni même un ordre. C'est sa manière à elle, et 'Nami devait en être familière, à la longue, de dire les choses : elle énonce des vérités, absolues, des certitudes inamovibles qui paraissent s'ancrer dans le monde par la seule force des mots et devenir réelles, parce qu'elle les avaient été prononcées. Le regard se fait insistant, quand elle parle, et plonge, et perce, avec toute l'autorité inflexible dont Saskia est capable.

- Tu avais déjà bien assez à te soucier,
reprend la sorcière alors que sa voix s'infléchit de nouveau d'un soupçon d'une douceur presque mélancolique. Qu'aurais-tu fait de toutes ces choses ? Tu luttais déjà contre tellement de démons, dans ta propre tête et autour de toi. Et puis, est-ce que tu m'aurais crue, toi ? Tu aurais dit "voilà tìa Saskia qui perd la boule !" et même si tu voulais y croire, cariña, je ne crois pas que cela aurait été bon pour toi.

Elle croise les doigts devant elle en repoussant légèrement sa tasse. Les mains longues et fines, chargées de bagues, clignotent en joyaux profonds en reflétant la lueur qui émane du pelage de Méryt lovée sur les genoux de la jeune femme. Elle lui éclaire le visage par-en dessous, dédoublant la clarté du soleil par une douce chaleur d'or profond. Saskia se souvient d'elle, comme elle se souvient de chaque créature, chaque âme qui a passé le seuil de sa maison à la recherche de quelque chose de plus que ce qui se monnaie simplement à l'aide de quelques billets. C'est qu'elle a bien changé, comme une petite pousse montée en graine. Elle se rappelle encore de la silhouette hésitante, de tout ce qui était en germe, alors, et qui a fini par enfin s'épanouir à sa façon pour forger une nouvelle chrysalide. Dans ce qu'elle était autrefois, quand elle n'avait même pas encore trouvé son nom, Saskia avait décelé l'esquisse amorcée, comme on discerne la forme des choses à venir dans les premiers modelés du sculpteur sur la matière brute.

- Il te fallait de la paix pour te permettre d'éclore. J'ai jugé que tu n'étais pas prête à vivre avec cette vérité-là. Je comprendrai que tu m'en veuille de t'avoir caché tout cela, cependant ; j'imagine que cela t'a attiré quelques moqueries et quelques ennuis, parce que personne n'a cru à tes doutes, n'est ce pas ?

De nouveau, les commissures des lèvres se meuvent, tracent un sourire de madone, et puis elle reprend :

- Je connais l'Ordre, et j'en suis familière. Nous faisons commerce, assez fréquemment, à dire vrai. Tu as déjà croisé des chevaliers et des chevaleresses, ici, j'en accueille quand il le faut et qu'ils ont besoin d'un endroit où loger, je leur fournis ce dont ils peuvent avoir besoin pour leur travail, mais je me contente d'être, comment dire... Un contact utile, pour eux. Nous avons bien trop de points de désaccord pour qu'il en soit autrement.

Elle qui vit dans les ombres, elle qui vit par l'Ombre, elle a bien trop de méfiance envers la pleine clarté dont ils se réclament, envers l'ordre, la rectitude de leurs chemins bien tracés. Son sanctuaire à elle, il a ses propres règles, qui déclinent une infinie palette de gris.

- Quant à ce que je sais, dame, il faudrait bien trop de temps pour tout te dire ! Lâche-elle avec un petit rire. Mais toi, tu en sais déjà beaucoup. Je vends, j'accueille, j'écoute, je protège. La seule différence c'est que sans doute il y a bien plus de magie dans tout ce qui nous entoure que tu ne l'a jamais imaginé, et peut-être qu'elle se trouve là où tu ne le soupçonnais pas. Cela ne va pas sans danger, pourtant, et c'est peut-être bien de cela que j'ai voulu te garder en te laissant dans l'ignorance. Je voulais pour toi une autre vie que celle-là, loin des ombres qui gisent derrière le voile. La magie ne fait pas que des bonnes choses, nena, et le monde te réservait déjà bien assez de crasses pour que tu n'aies pas à te soucier en plus de savoir te garder des choses qui rôdent dans le noir.

Une pause, Saskia étend la main pour effleurer ses cheveux.

- Je t'ai laissé quelque chose, en partant, tu te souviens ? Un talisman, pour veiller sur toi. Il y avait un peu plus dans ce sachet que des herbes et des pierres qui brillent.
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Sam 17 Oct - 20:01

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'Nami Hergalt

'Nami Hergalt
Sa main trembla légèrement ; une once de peur, noyée dans le puits de lumière.

Il y avait quelque chose qui transcendait l’espace dans cette petite cuisine. Là, ‘Nami brillait en plein jour. Les éclats d’or venaient se perdre dans ses mèches pastelles et faisaient presque disparaître les traînées sombres et disgracieuses au bord de son regard. Elle sentait la chaleur, une douce caresse réconfortante le long de sa peau ; mais ses yeux lui offraient une autre vérité, un autre temps – la Nuit. Saskia et ses voiles obscures, drapée de secret, d’ombre et de mystère. Elle avait eu l’impression, fugace, d’avoir fait un pas vers elle, d’effleurer son monde ; en quelques mots, elle prit conscience de la distance qui les séparait. Un léger vertige.

D’autres mots encore, et l’impression de repartir à zéro, perdre ses repères et ses acquis. Elle lui avait menti pour son bien. Elle était certaine qu’Aube dirait pareil de sa dernière duperie. La Magie était une ancre pour elle, une ancre et surtout une diversion. Quand la chose la plus importante qu’on ai à lui reprocher était ses lubies de sorcières, ses extravagances fantaisistes sur un autre monde, elle ne pouvait se sentir plus en sécurité. Et au fond d’elle, savoir qu’il pouvait y avoir plus que l’acceptable lui avait toujours été une source de réconfort, même frêle et même incertain.

Mais encore d’autres mots, encore, encore. Une nouvelle référence à l’Ordre et leur position contestable. L’organisation semblait prendre une large place dans l’activité de ce nouveau monde, mais le portrait qu’elle en dressait jusque là n’avait rien d’appréciable. Et rien sur l’Étoile. Elle était partagée ; Saskia devait savoir, ça ne faisait aucun doute – n’avait-elle rien à en dire ou était-ce encore un de ses secrets ? Encore une question en suspens.

Puis... le talisman ? Les mots cessent. Le silence s’installe ; c’est à elle de répondre. Elle sent la pénombre tomber sur ses épaules, comme une attente pesante.

« Bien sûr que je ne dirai rien de ce que tu me dis... »

Rassurant Méryt d’une main, elle se penche vers son sac pour, du bout des doigts, en extraire un grigri. Un sachet de tulle, dont la couleur est complètement passée. À travers la maille, les pierres capturent les rayons du chat pour les teinter de nuances plus intenses, du violet, du rose – forcément. On remarque aussi une brindille, complètement sèche ; les feuilles qui l’ornaient sont depuis bien longtemps tombées en poussières. ‘Nami pose l’objet entre elle et Saskia, et détourne le regard au loin.

« Pour l’instant. »

Un frisson la parcourt ; le chat-soleil ne l’aidera pas, ce coup-là. Comme une nuée d’aiguilles qui remonte dans l’ombre de son dos, une désagréable sensation de confrontation. Son visage revient lentement dans l’axe de la conversation, ses yeux fixés sur le sachet, incapable d’affronter l’obscurité qu’elle craint l’engloutir pour cet affront.

« … Je sais que tu fais ce que tu estimes le mieux ; pour nous, pour toi. Tu es raisonnable et tu veilles sur nous. Je sais tout ça. Mais… Tu peux pas choisir de me priver de merveilles comme Méryt parce l’ombre existe. Tu ne pouvais pas décider que je garderai en moi cette incertitude, cette intuition tue à jamais. Je ne suis pas comme toi à pouvoir tout gérer en silence – par le silence. Tu le sais très bien : un jour, je parlerai. »

Si elle avait l’impression jusque là que l’univers de Saskia lui était inaccessible, une frontière lointaine et cachée qui s’éloignait à mesure qu’elle s’approchait, elle se rendait compte qu’elle-même changeait doucement de direction. D’un modèle, une mentor, elle n’avait plus exactement la même place dans ses aspirations ; son chemin divergeait. Elle n’oubliait en rien tout ce qu’elle lui devait, tout ce que pour elle, elle ressentait. De toutes les questions qui se croisaient, elle n’en avait qu’une d’importance à ce moment.

« Oui, je vais sombrer dans ce nouveau monde. Ça a déjà commencé. Je vais sombrer ; ça ne sera que la seconde fois, hein. Et j’aimerais encore compter sur toi... Est-ce que tu m’accompagneras ? »
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Mar 10 Nov - 17:51

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Saskia Alvarez

Saskia Alvarez
- Tiens donc, dit Saskia, doucement.

La tête s'incline, comme celle d'un chat intrigué. Les yeux se plissent, légèrement, sans que l'on sache si c'est d'agacement, d'amusement, d'autre chose encore tant les émois glissent sur sa figure d'albâtre comme les rides sur une onde calme. Elle n'en a pas pris une seule, de ride, depuis que 'Nami est arrivée chez elle, et parfois, les gens mettent un temps fou avant de se rendre compte que quelque chose cloche et que l'éternelle jeunesse altière de la patronne n'est peut être pas seulement à mettre sur le compte de l'efficacité de son antirides ou d'un patrimoine génétique coopératif.

Saskia se demande, tout bas, quand sa protégée finira par soupçonner quelque chose. Peut-être même qu'elle soupçonne déjà quelque chose, d'ailleurs.

- Tu parleras ? Très bien, alors. Qui suis-je pour t'en empêcher ? Je me demande bien à qui, cependant, et je me demande qui t'écoutera. Tu ne t'es jamais demandé pourquoi je garde un secret absolu sur la vérité des choses qui se passent ici ?

Elle sourit. Simplement, un sourire ; rien de plus, mais la bouche qui se fend sur les dents très blanches et très droites se fait un rien plus froide dans son tracé symétrique. Il y a comme une curiosité piquée par l'espèce de rébellion obstinée de la jeune fille.

- J'ai choisi de te priver de certaines choses pour te protéger d'autres, pires encore. Est-ce que tu aurais vraiment dormi sereinement en sachant que moi, et des générations d'autres femmes avant moi avons peint des signes sur les murs de chaque chambre pour éviter que les elfes des cauchemars viennent hanter nos protégées ?

"Tu va répondre que oui, par défi", songe-elle en souriant toujours, et en plongeant ses yeux perlés dans le regard farouche qui l'observe, de l'autre côté de la table.

De nouveau, la tête oscille. Elle se demande ce qu'il en est vraiment. Ce qu'il y a de véritable courage derrière le défi et l'ardeur de la jeunesse qui brûlent, qui brûlent, qui font le regard résolu et le nez sanguinolent par trop de batailles qu'on essaie de gagner à tout prix. C'est une digne fille de cette maison, après tout, elle a l'aplomb qui renverse les choses, mais enfin : est-ce vraiment lui rendre service, que lui dire oui ?

- Je peux le faire,
reprend-elle, en écho à ses propres pensées. Selon mes règles, bien entendu. Il serait impensable que je t'abandonne maintenant, à une période si cruciale où tu t'enfonces dans des remous dont tu n'as pas encore idée. Ce sera... Intéressant, sans doute. Je suis curieuse de voir la manière dont tu vas te faire à ce nouveau monde. Ce que tu vas y apporter, et ce qu'il t'apportera en retour.

Ses longs doigts minces, cerclés de lourds joyaux, se déplient pour effleurer la main de 'Nami. Un rien de douceur, encore. Ils se saisissent du sachet, déplient les rubans fatigués, manipulent lentement les petits objets aux teintes passées qui exhalent de faibles relents d'une magie qui a fini par s'affadir. Elle regarde les pierres, les herbes mortes, et secoue la tête en pinçant les lèvres.

- Il faudra que je t'en fasse un autre. Celui là a fait tout ce qu'il pouvait, même si, eh bien. Je te souhaite de ne pas en avoir vraiment besoin. Mais je serais plus tranquille, avec ceci sur toi, je te saurais un peu plus en sécurité que si tu allais sans rien.


Une pause, puis, d'un ton qui n'est anodin qu'en apparence, elle demande :

- Parle-moi de ton amie, celle qui t'a donné ces fameux cachets. Cela m'intrigue.
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Mer 11 Nov - 18:53

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'Nami Hergalt

'Nami Hergalt
Et en toute évidence, elle répondit oui par défi.

Dans l’idée, du moins ; le son ressemblait davantage à un grommellement contradictoire d’une gosse de cinq ans qu’on punit – tant pis. Elle n’avait pas eu besoin à l’époque que les elfes de cauchemars débarquent dans la nuit pour la tirer dans les ténèbres, elle en avait été capable seule, et d’une manière bien plus intime, viscérale. Peut-être que savoir pour ces protections lui aurait donné un soutien supplémentaire ; c’est ce qu’elle voulait croire à cet instant, en tout cas.

Elle perdit son expression enfantine l’instant d’après, chassée par un soupir de soulagement à peine masqué. Saskia venait de lui donner son approbation – à sa façon, certes. Il lui était soudain plus aisé de soutenir son regard, l’hostilité perçue retournant à mesure vers l’habituelle impériosité de sa protectrice. Celle qui maintenant s’emparait de ce qu’il restait du talisman donnait l’occasion à ‘Nami de s’attarder à la contempler. Elle enviait son style, jalousait ses bagues, admirait ses traits. Elle aussi aimerait imposer une telle aura, invoquer tant de présence – même si plus colorée. Elle sourit à penser qu’en d’autres circonstances, elle aurait pu lui demander son secret pour garder une si belle peau, échanger des conseils maquillages autour d’un thé – si elle ne passait pas son temps à débarquer de manière dramatique pour prendre des décisions irrévocables.

« Ohh, si tu veux je te raconte à quel point elle a l’air forte et décidée. Elle est adorable et c’est génial de discuter avec elle. Elle a des idées et de l’ambition et ne se laisse pas démonter par l’imprévu ; il suffit de voir comment le faux plan d’Aube est devenu une opportunité pour elle de se faire une amie ! J’peux te résumer nos échanges textos à s’envoyer des photos de créatures – d’ailleurs, j’crois qu’elle m’en a envoyé y quelques minutes. Je peux me perdre en détails comme tu en as l’habitude – ou je peux aller à l’essentiel et évoquer son recrutement pour l’Étoile du soir. »

Elles sentaient ses jambes s’engourdir et se dit qu’il était temps pour Méryt de continuer sa sieste ailleurs. Elle l’attrapa comme la grosse peluche qu’elle était et se retrouva surprise à la trouver plus lourde que dans ses souvenirs. Elle était peut-être à blâmer de ne pas être assidue sur le sport mais l’image de Saskia l’impénétrable complètement béate au point de céder à tous les caprices gustatifs de ce petit rayon de soleil était définitivement une bien meilleure hypothèse.

Elle posa la boule de poile éclatante sur son épaule et continua sur un ton un brin plus sérieux.

« J’pense qu’on va commencer par là. Parce que, comme tu le rappelles si bien, je peux compter sur toi pour un secret absolu. À mes yeux, tu le fais parce que c’est ton rôle, ce qu’on attend, ce dont on a besoin. C’est le refuge nécessaire à l’ado paumée qui vient frapper à ta porte dans un dernier espoir. Hier comme aujourd’hui, c’est ce qui fait que je peux tout te dire. Ça ne sera jamais ma place de me taire autant ; et je t’en voudrai par occasion de le faire.  »

Qu’importe, c’est ainsi que fonctionnait leur relation. Alors elle déroula la suite de son histoire. D’abord l’intention de recruter Aube officiellement dans l’Ordre, secrètement dans l’Étoile, suivi d’un résumé des positions idéologiques vendues par la De Brunelles concernant ce mouvement contestataire à un système établi dans la profusion d’autorité et de mystère. La journaliste précisa l’absence formelle d’invitation de Marie-Malaury – pour le moment.

« Aucune chance après ça que je reste dans l’ignorance. Un appel, et ces portes s’ouvrent à moi. Et si je n’ai pas d’autres choix, tu sais que je n’hésiterais pas à franchir ce seuil face à l’inconnu. »
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Mer 9 Déc - 16:59

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Occupation : Commerçante
Saskia Alvarez

Saskia Alvarez
Saskia oscille du chef et sourit, doucement, tout en remuant son thé qui refroidit. Elle observe la jeune femme en silence, et la façon dont elle s'anime et parle, vite, fort, beaucoup. Le nom qu'elle pose enfin la fait relever les yeux de sa tasse, avec une vivacité qui trahit son intérêt. Elle se tait, encore, comme un chat qui guette. Et puis un autre sourire lui soulève le coin de la lèvre, et elle oscille du chef.

- Eh bien, en voilà des choses à dire. Si tu veux mon avis, ils se valent tous, l'Ordre, autant que l'Etoile. Mais il faut bien que jeunesse se fasse, et puis tu as l'air si enthousiaste, je crois qu'au fond, tu as déjà pris ta décision et qu'il faut bien que tu fasse tes propres armes. Sois prudente, neña. Aies la confiance rare et l'esprit affûté.

Saskia ménage une pause, et ses yeux clignent, presque à regrets. Il y a des frissons de perles le long de ses joues quand elle chasse, du bout de ses doigts chargés de bagues, quelques mèches très noires qui serpentent hors de son chignon. L'insolence de 'Nami a quelque chose de touchant, si elle ne craignait au fond ce qu'elle pourrait la pousser à faire.

- Mais tu dois savoir, et cela me navre de devoir te le dire : je n'aime pas l'Ordre, je n'aime pas l'Etoile d'avantage. Cloîtrer les Entités et les contrôler ne vaut pas mieux que vouloir les exposer au grand jour, et j'ai eu maille à partir avec les deux. C'est bien le problème d'être entre deux, il arrive que nous ne nous entendions guère et les alliances sont fragiles.

Elle secoue la tête, et oscille pour observer Méryt qui déborde un peu du dossier de la chaise de son invitée.

- Il y en a qui sont venus ici pour nous convaincre, tu sais. J'y ai réfléchi, et puis j'ai pensé à Méryt, et aux autres : que penses-tu qu'en feraient certains, s'ils découvraient des animaux comme elle ? Ils sont déjà au bord de l'extinction, ça n'aurait mené à rien de bon.


Une pause, elle boit un peu de thé, puis sourit avec un rien plus de légèreté.

- Tu as remarqué qu'elle a grossi, toi aussi ? Je crois bien que la gatita attend des petits. Je vais devoir être attentive, plus encore.

C'est comme si c'était fait exprès, et à la fois le pur hasard : quand elle reprend, la sorcière regarde encore 'Nami dans les yeux, comme pour lui faire mieux comprendre l'importance de ce qu'elle s'apprête à faire, ce dans quoi elle s'engage.

- C'est pour elle et bien d'autres que je tiens au secret sur cet endroit, parce que c'est comme ça que je protège celles qui y vivent. Moins il est connu, mieux nous nous portons, toutes autant que nous sommes. Tu sais que je ne changerai pas d'avis.


Il se fait doux encore, le sourire, et un peu triste, peut-être.

- Et je te connais assez pour savoir qu'une fois que tu l'auras fait, ton choix sera définitif.

Elle ne dit pas ensuite ces paroles qui hantent son cœur d'une ondée passagère. Elle connaît assez bien la journaliste pour savoir que oui, elle ira jusqu'au bout, et c'est bien ça qui l'inquiète. C'est bien pour ça aussi qu'elle ne dit rien, parce que la flamme qui brûle tout au fond ne sait pas encore s'arrêter, et peut-être qu'elle ne l'apprendra que plus tard, mais au prix de bien des choses que Saskia n'est pas encore prête à sacrifier.  

- Tu fais partie de cet endroit, toi aussi, et j'espère que tu sauras t'en souvenir le moment venu
.

Saskia ne fait pas plus de lumière sur ses paroles, car déjà un clopinement familier se fait entendre dans le couloir et elle se penche par la porte ouverte pour faire signe à la vieille femme qui s'avance.

- Abuelita, viens donc voir qui nous a rendu visite aujourd'hui !

Si rien, chez Saskia ou dans le décor n'a changé, La vénérable grand-mère non plus, n'a guère pris plus de rides : rabotée par les ans, voûtée, crochue sous les cheveux blancs comme neige qui dépassent de son turban, elle a toujours le même visage fripé comme une pomme blette. Le contour de ses yeux, plissés comme par un sourire perpétuel, fait filer le khôl dans les ridules, comme l'encre verte des tatouages sur son front. Pourtant, est-ce que ce sont des talons, qui font tant de bruit quand elle marche, péniblement, dans un basculement de vieille armoire bancale ? Un son de sabot, net, mat, qui claque et sonne contre le plancher.

Quand l'aïeule passe près d'elle, Saskia lui effleure doucement le bras.

- Ella sabe, dit-elle à voix basse. Se puede verte.

Elles échangent quelques mots, encore, comme elles le font parfois dans une langue ou une autre quand il est de bon ton de dérober le sens des mots à des oreilles indiscrètes.

Quelque chose claque encore sous la robe de Aïsha quand elle vient serrer 'Nami dans ses bras, et lui donner quatre bises claquantes sur les joues. Les manches profondes de son abaya et les épaisseurs cliquetantes des colliers de santal et d'argent enveloppent brièvement la jeune femme dans des profondeurs de linge propre, de savon noir et de parfum entêtant. L'aïeule lui prend le visage entre ses paumes et lui pince les pommettes en la couvant d'un regard ému.

- Qu'est-ce que tu as grandi, dame, tu vas me faire me sentir vieille.


Elle finit par s'asseoir près de Saskia, et puis le regard jaune se fait perçant, un brin espiègle. C'est étrange, dans l'interstice des paupières étroites, réduites à de minces étroitures où coule le miel des iris couleur d'ocre doré, il semble que la pupille n'a plus sa forme coutumière.

- Alors, lance Aïsha de sa voix toute ronde et toute rocailleuse, qu'est-ce que ça fait d'avoir vraiment les yeux ouverts, maintenant ?
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